05 juillet 2012

Sur la piste d'Alcalá - I


Alcalá de Guadaíra, ville d'environ 70 000 habitants, à 20 km au sud-est de Séville

Il n'est pas facile pour un aficionado débutant (comme je le suis), de distinguer, par la théorie comme par l'écoute, les différentes formes d'un même palo. Dans ce blog, je vais explorer des formes du cante qui paraissent incontournables pour essayer d'y voir plus clair parmi certaines des innombrables nuances que l'on trouve pour chaque palo flamenco.

Pour commencer je vais tenter de décortiquer et d'écrire sur une des formes les plus classiques et parmi les plus appréciées  : les Soleares d'Alcalá.
Le cantaor qui a le plus contribué à donner ses lettres de noblesse à ce cante est sans aucun doute Joaquín el de la Paula (1875-1933). Considéré unaniment comme un des grands maîtres du cante por solea, il n'a malheureusement jamais enregistré. Il se produisait essentiellement dans le cadre familial ou semi-public, ce qui ne l'empêcha pas d'atteindre une certaine célébrité et surtout la reconnaissance de ses pairs. Il influença les plus grands cantaores et cantaoras de son époque, qui furent nombreux à enregistrer de son vivant les soleares de Joaquín el de la Paula : Tomás et Pastora Pavón, Manuel Torre, Pepe Marchena...

 Joaquín el de la Paula et Manuel Torre

 Toutefois la popularité et la reconnaissance des soleares d'Alcalá doivent beaucoup à Antonio Mairena qui les a interprétées à de nombreuses reprises.  Joaquín el de la Paula était une de ses influences principales, comme il le dit à Juan de la Plata en 1954, lors d'une interview que nous pouvons lire grâce au blog "Flamenco de Papel".
Il fut, sinon le découvreur, le principal promoteur des cantaores d'Alcalá. qui ne se produisaient le plus souvent que pendant des fêtes privées. Il a contribué à les faire connaitre à un public beaucoup plus large et  leur a dédié de multiples pages dans son fameux livre co-écrit avec Ricardo Molina, Mundo y Formas del Cante Flamenco.
Pour les deux auteurs le cante d'Alcalá est la variante (qu'ils qualifient d"indigène") du cante por Soleá la plus pure qui nous soit parvenue :


 Mundo y Formas del Cante Flamenco, p.215


Ils  insistent  sur le fait que les soleares d'Alcalá, à la différence de celles de Cádiz, sont le "produit du village" et non d'un ou deux artistes de renom locaux. Or on sait que les formes telles que nous les connaissons des soleares d'Alcalá sont issues d'une seule famille de cantaores, la famille de Joaquín el de la Paula  comme cela fut évoqué lors d'une table ronde de la Peña Flamenca de Jaén publiée dans El Candil Flamenco.
Outre Joaquín, les deux personnalités incontournables lorsque l'on évoque le cante d'Alcalá sont Agustín Fernández (son frère) et le fils d' Agustín,  Juan Talega (1891 - 1971).



  Juan Talega

 Nous n'avons pas de traces (du moins à ma connaissance) à Alcalá de cantaores antérieurs à Joaquín el de la Paula et Agustín Fernández, si bien que nous nommons soleares d'Alcalá, leurs interprétations.
Antonio Mairena et Ricardo Molina soulignent que le cante por Soleá d'Alcalá existait avant l'arrivée del de la Paula, mais ne donnent pas plus de détails à ce sujet.
Le flamencologue français Pierre Lefranc dans son ouvrage El Cante Jondo: Del territorio a los repertorios: tonás, siguiriyas, soleares, évoque une possible influence de Triana :

El Cante Jondo: Del territorio a los repertorios: tonás, siguiriyas, soleares, p177


Dans l'extrait ci-dessous, Enrique el de la Paula, le fils de Joaquín, chante por Soleá et explique au journaliste la différence entre le cante d'Alcalá et le cante de son père (à 3'20) :

"(...) Le cante d'Alcalá était un chant court. Il y avait quatre flamenquillos ou flamenquillas par ici qui le chantaient très bien. Mon père l'a agrandi. (...)"


Jesucristo vino al mundo
para enseñarnos la doctrina
y cuando llegó al querer
todo se volvió mentira

mi corazón se ha empeñado
en salirse por la boca
muchas veces lo ha probado
pero nunca se equivoca

me pegaste un silbido
por la salud de mi mama
yo no te había conocido


Pastora Pavón interprète des Soleares de Joaquín el de la Paula :





To be continued



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