11 juillet 2012

Sur la piste d'Alcalá - II


Manolito el de María, Anzonini, Paco del Gastor

Le cante flamenco se transmet presque exclusivement par oral : "El cante no cabe en el papel" ("Chant et papier n'ont rien en commun") disait Joaquín el de la Paula, (Luis López Ruiz, Le guide du Flamenco) ce qui ne facilite pas la tache lorsque que l'on essaye de décrire et de différencier les cantes les uns des autres...

Il y a plusieurs aspects à prendre en compte pour reconnaitre une forme d'un palo : l'aspect musical et mélodique, la façon dont sont "placés" les textes sur le compás, et les letras. 

Mais aucun des trois aspects n'est figé. Les cantaores, même les plus casaniers ont tous été amenés à écouter des cantaores d'horizons et de styles différents et donc à recevoir leur influence; par ailleurs l'inspiration du moment tient une place importante dans l'interprétation, sans parler bien sur de leurs capacités et de leur personnalité.

Ainsi Tomás Pavón chante des soleares classiques sur des textes modernes, comme le note Manuel Bohórquez ( La Niña de los Peines en la Casa de los Pavón p.315) : Tomás "no elige letras tradicionales, como podría esperarse de un cantaor tan clásico como el sevillano de la calle Leoncillos, sino de compositores de su tiempo".




Pastora enchaîne deux soleares de Joaquín el de la Paula, habituellement séparées par une pause (Pierre Lefranc, El Cante Jondo: Del territorio a los repertorios: tonás, siguiriyas, soleares).

 El Cante Jondo: Del territorio a los repertorios: tonás, siguiriyas, soleares. p. 182

Revenons aux soleares de Alcalá. Les auteurs divergent un peu sur le nombre de cantes classiques. 
Entre six et huit soleares selon Antonio Mairena & Ricardo Molina et huit pour Pierre Lefranc : deux dont l'origine provient de La Roezna (mère de Juan Barcelona, elle importa semble t-il les soleares de la Jilica de Marchena à Alcalá), deux attribuées à Augustín Talega, trois créees par Joaquín el de la Paula et une par Juan Talega.

Le cante por Soleá d'Alcalá, est dans son ensemble un cante plutôt calme et solannel, marqué par des pauses et au tempo relativement lent. C'est un chant plutôt épuré d'éffets et de recours. Les formes se différencient essentiellement par des variations des modulations de la voix, et dans la façon dont les vers sont placés sur le compás.
Quelques exemples :

Soleares de Augustín Talega (A Dios se lo pido de favor) et Joaquín el de la Paula (Quise cambiarle y no quiso), interprétées par Antonio Mairena - (source : antoniomairena.com)



1. Agustín Talega. (Soleá de transición).
A Dios se lo pio de favor
de mi camino te quite,
que vas a ser mi perdición.


2. Joaquín el de la Paula.(Estilo recreado por Mairena).
Quise cambiarle y no quiso
el pañuelo de lunares
por otro de fondo liso.


3. Frijones (Jerez)
Dame la manita y vente
y de cómo yo me he portao
se lo cuentas a tu gente.


Soleares de Joaquín el de la Paula (A quién le contaré yo) et Juan Talega (Que no me querías et cuando a ti nadie te quiera), interprétées par Juan Talega.


1. Joaquín el de la Paula
 ¿A quién le contaré yo
las fatiguitas que estoy pasando?
se lo voy a contar a la tierra
cuando me estén enterrando

2. Juan Talega
¿Que no me querías?
cuando alante tu me tienes
el sentío te desvaría

3. Soleares de Triana
dices que tu a mí no me quieres
pena yo no tengo ninguna
porque yo con tu querer
no tenía hecha escritura

4. Juan Talega
cuando a ti nadie te quiera
ven, que yo a ti querré
que el daño que me hiciste
que yo te lo recompensaré

5.
¿Que no me querías?
cuando delante tú me tienes
el sentío te desvaría

6.
ay, que te quiero y tu no lo sabes
eres la causa de todos mis males


 Un peu de théorie :

Dans la letra ci-dessous, nous voyons une manière de placer le texte caractéristique des Soleares à quatre vers (dite "Soleá grande") d'Alcalá : les deux premiers vers sont enchainés, puis, après une courte pause le deuxième vers est répété deux fois.
 
Mundo y formas del cante flamenco, p.219 

  Le musicologue américain Michael Tenzer a publié une étude très approfondie de l'enregistrement por soleá de Juan Talega (A quién le contaré yo) publié ci-dessus.

Bien sur le cante d'Alcalá ne se limite pas aux trois célébres solealeros. Parmi les cantaores incontournables de cette ville on trouve parmi beaucoup d'autres (à l'époque de
Joaquín) Manolito el de la Maria, (son cousin), Bernardo el de Los Lobitos ou encore Platero de Alcalá.

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