Jean-Luc Godard, le Mépris, 1963. Fritz Lang, el maestro y su cuadrilla
Décidément, le tercio de piques est à la mode.
Les spectateurs de Las Ventas sont sortis tout retournés de la prestation, lors de la dernière
San Isidro, du picador de Javier Castaño, le fameux Tito Sandoval, et l’idée du rééquilibrage des tercios
fait florès dans les blogs. A mon tour, quelques mots sur ce premier acte si
controversé.
Il a plusieurs fonctions, ce tercio :
Avant tout, amoindrir les facultés physiques du toro. C’est qu’en attendent les toreros et ce qui s’est pratiqué au cours des décennies passées. Pour cela, un bon gros cheval, un bon gros picador, une bonne grosse pique et un bon gros puyazo suffisent. Pas la peine d’y revenir : le travail est fait du premier coup.
Avant tout, amoindrir les facultés physiques du toro. C’est qu’en attendent les toreros et ce qui s’est pratiqué au cours des décennies passées. Pour cela, un bon gros cheval, un bon gros picador, une bonne grosse pique et un bon gros puyazo suffisent. Pas la peine d’y revenir : le travail est fait du premier coup.
Evolutions des piques au fil des années
Inconvénients : il est peu question de
bravoure (qui n’est pas en jeu
dans cette manière de faire) ni de spectacle (il n’y a rien à voir). On pratique
de cette manière dans la plupart des corridas en arènes
de 2ème et 3ème catégorie.
Ensuite, éventuellement, juger la bravoure du toro. C’est ce qu’attend (ou
redoute) le toro. Pour cela, il faut : un torero décidé à jouer le jeu
(Javier Castaño, par exemple), un cheval léger (moins de 600kg), un
picador bon cavalier, capable de placer sa pique au bon endroit dans le
dos du toro, bon connaisseur des toros, sachant doser la puissance et la
durée du coup de lance , une pique de dimension et de profil revus (pique andalouse, de type « Bonijol ») montée à l’endroit (Messieurs les Alguazils, allez donc surveiller cela, s’il vous plait !), une mise en
suerte un peu plus distante à chaque puyazo.
Toro de Morena Silva, Ceret 2012
Avantages : proposer au toro de retourner deux ou trois
fois permet de voir comment il réagit à la douleur et si son envie de vaincre
est plus importante que sa crainte de souffrir ; d’autre part, la mise en
suerte à distance de plus en plus importante puyazo après puyazo met en
évidence l’intensité de la
bravoure du toro et quel est l’espace autour de lui qu’il estime inviolable ;
enfin au fil des rencontres, on peut apprécier avec plus de certitude le style
du toro, car ce n’est pas tout d’aller au cheval, encore faut-il le faire avec
classe (sans tarder, au galop), et
arrivé contre le caparaçon, pousser tête baissée, perpendiculairement, avec les
deux cornes, en s’appuyant sur les 4 sabots. Les aficionados connaissent ces critères.
Enfin, qu’il soit un authentique spectacle. C’est ce qu’espèrent les spectateurs. Parmi eux, il y a ceux qui en attendent un moment d’agréments où se mêlent les émotions devant la charge du toro, et les plaisirs des quites variés.
Joselito Adame, Quite por Zapopinas, toro del Conde de la Maza, Seville 2012
Pour cela, il est nécessaire que les toreros montrent leur envie de plaire et se lancent dans la compétition, capote en main. Mais qu’ils agissent avec parcimonie et modération! Il ne s’agit pas, pour la gloriole, de se lancer dans des quites interminables qui ruinent la suite en épuisant le toro.
Et puis il y a ceux qui veulent que l’attention soit centrée sur le combat de l’animal et que se prolonge cet affrontement toro contre picador au-delà des deux et exceptionnellement trois attaques habituelles. On voit ainsi, lors de corridas-concours, (en France, notamment) des séries de 4, 5 piques par toro, avec des mises en suerte à des distances considérables (parfois d’un bout à l’autre de la piste, comme à Nîmes lors de la corrida de Miura qu’affrontait seul Javier Castaño, 2012), et certains, y prenant goût, souhaiteraient que cela devienne pratique courante.
Corrida de Adelaida Rodriguez à Ales 2013
Pour cela, il faut revoir entièrement les conditions matérielles et réglementaires de ce tercio : pique réduite de moitié (3 à 4cm de la pointe à la garde, laquelle devrait être ajustable) ; durée des puyazos limitée à quelques secondes (aux Alguazils de surveiller) ; un seul picador en piste (comme cela se pratique lors des corridas-concours ou en corridas ordinaires à Céret ou à Alès) ( à quoi sert ce second picador qui ne doit pas intervenir : qu’il se tienne prêt, hors de la piste) ; retrait des toreros inutiles derrière les barrières et aux burladeros : seuls restent en piste le torero d’active et son peon de brega, se plaçant l’un d’un côté, l’autre de l’autre du cheval pour éviter les distractions et échappées du toro ; cheval léger et caparaçon souple ; suppression des lignes délimitant l’espace du cavalier qui doit pouvoir s’avancer vers le toro si celui-ci, placé trop loin, tarde à s’élancer.
Ainsi réalisée, la suerte de vara pourrait être menée à
bien, à condition, bien sûr, qu’elle s’effectue en jugeant continuellement et
avec pertinence l’état du toro, sans obstination, avec doigté, avec délicatesse
même, sans risquer d’anéantir le toro et de ruiner tout espoir de voir le
tercio de banderilles et surtout celui de muleta. Toutefois, demander à un toro
de galoper et recevoir trois paires de banderilles après avoir subi 4, 5 ou 6
puyazos est inhumain : deux paires à harpons courts seraient suffisantes.
Quant aux toreros qui attendent le premier avis avant d’aller chercher l’épée,
ils devront revoir leur plan de faena. Enfin les spectateurs qui aiment les
quites fleuris devront se faire une raison : ou le toro expose sa bravoure
en fonçant 4 fois au cheval, ou il sert de faire-valoir au torero, mais pas les
deux : il faut choisir son spectacle.
Mais tout ceci est lié à des volontés et à des
aptitudes. Les toreros talentueux désirent-ils laisser à d’autres une partie de
leur gloire ? Les autorités, les syndicats seront-ils jamais disposés à
modifier les antiques pratiques ? Les picadors ont-ils tous la capacité de
mener avec brio un tercio de vara quand mettre la pique au bon endroit semble
impossible à la plupart d’entre eux ?
Juan José Esquivel, photo du site de la Unpbe
Le rééquilibrage des tercios est une chose nécessaire et salutaire. Donner au premier de la signification et du panache est profitable à l’ensemble de la corrida.
Attention toutefois aux excès, et à
ne pas déplacer le centre de gravité de la tauromachie en reléguant le torero
au rôle de matador. Les formidables succès récents de certains subalternes sont
sympathiques, mais obtenus en effectuant brillamment des tâches qui restent
mineures. Les picadors, du haut de leurs montures, risquent peu le coup de
corne et leur équipement de chevaliers du Moyen-Age les rend quasiment
invulnérables. La prééminence du torero maestro sur tous les autres acteurs
doit être préservée. La corrida est avant tout la rencontre d’un homme et un
toro avec leur destin. Tous les autres participants ne sont que des auxiliaires
et ont le devoir de le rester.
Cesar Rincon con Bastonito de Baltasar Iban, photo du blog solymoscas
Exceptionnel, magistral, fastueux, impressionnant
RépondreSupprimerUn fuerte abrazo